Treize à Paris, 8 contre Monaco, 21 à Saint-Étienne – des chiffres inédits cette saison dans le Big Five, et même depuis une décennie en Ligue 1 –, 12 à Reims : depuis qu’Antoine Kombouaré a définitivement tourné le dos au jeu de passes fin novembre, optant pour une approche plus directe qui a porté ses fruits – un seul match perdu en huit rencontres –, Nicolas Pallois peut désormais s’adonner pleinement à son art des dégagements. Il s’agit ici du véritable dégagement, celui qui s’envole vers les gradins, s’élève dans les cieux ou atterrit aux abords de la surface adverse, mais jamais – du moins intentionnellement – sur la tête d’un coéquipier. À Nantes, une partie des supporters souhaiterait parfois voir des relances plus conventionnelles (« Guardio-qui ? »), mais à la Beaujoire, ce sont des ovations qui résonnent chaque fois que l’ancien joueur de Quevilly envoie une longue balle effleurer les nuages de la cité des ducs – le divin chauve a d’ailleurs été désigné Canari du mois de janvier.
Au cours de la saison actuelle, le classement des meilleurs « dégageurs » de la Ligue des talents est dominé par les Canaris, avec Nathan Zézé (7,2 dégagements en moyenne par match) et bien sûr le puissant Nico (6,9) : des moyennes jamais vues dans le championnat depuis l’exercice 2021-2022 de Kiki Kouyaté (7, avec le FC Metz). Cette saison, les concurrents comme Gautier Lloris (5,9), Jubal (5,8) et Étienne Youté (5,7) sont largement distancés. Dans les cinq grands championnats européens, pour la saison 2024-2025, seuls Denis Vavro (Wolfsburg, 8) et Ardian Ismajli (Empoli, 8,3) parviennent à rivaliser avec les deux Nantais. De plus, Pallois n’a pas quitté le top dix de Liguain depuis 2019-2020. Ces chiffres illustrent bien ce Kombouarismo exacerbé (les Jaune et Vert affichant 24,9% de possession à Geoffroy-Guichard), voire ce que certains pourraient qualifier d’anti-football.
Les Maîtres du Dégagement : Un Art à Part Entière
Cependant, balancer des dégagements à tout-va n’est pas à la portée de n’importe quel joueur : cela nécessite un placement adéquat, une bonne lecture du jeu, des réflexes aiguisés, de la puissance, de la détermination, une force de frappe et une concentration constante. Ce sont ces qualités qui distinguent les défenseurs ordinaires des véritables grands. Un dégagement est souvent synonyme de duel remporté, d’interception réussie ou de récupération de second ballon. Il incarne un football instinctif, lucide, pragmatique, sans prétention, qui ne cherche pas à se travestir. Existe-t-il un terme assez fort pour décrire la sensation qui vous envahit lorsqu’un tir puissant, envoyé à l’autre bout du terrain, met fin à un moment de panique dans votre zone défensive, suivi d’un « ON MONTE ! » crié par le défenseur qui vous accompagne ? Tactiquement, un tel choix de jeu n’est pas non plus absurde, surtout lorsque le pressing adverse devient étouffant et que le moindre risque pris lors d’une relance peut se transformer en catastrophe. Parfois, par un coup de chance, le ballon atterrit sur le genou de Ludovic Blas et finit au fond des filets.
L’histoire de la Ligue des champions le confirme. Par le passé, les équipes qui atteignaient les finales possédaient souvent des défenseurs centraux capables de dégager avec puissance. On se souvient de duos emblématiques, tels que les Monégasques Sébastien Squillaci et Julien Rodríguez, les Reds Jamie Carragher et Sami Hyypiä, les Gunners Kolo Touré et Philippe Senderos, ou encore les Mancuniens Nemanja Vidić et Rio Ferdinand (environ 13 dégagements chacun par match en 2007-2008 !), sans oublier les deux piliers de Dortmund, Neven Subotić et Mats Hummels, ainsi que Virgil van Dijk avec ses sept dégagements par rencontre en 2017-2018. C’était une époque révolue, car aujourd’hui, le football moderne et ce fameux Guardiolisme ont relégué ce geste défensif, parmi les plus nobles du sport, au second plan, tout comme le tacle glissé ou le geste de lever la main pour signaler un hors-jeu. Mais cela, les théoriciens du football ne sont pas prêts à l’admettre.
Un dispositif de signalement contre les violences mis en place à la Beaujoire
