Le 30 juin 2006, à 17 heures, l’Olympiastadion de Berlin s’illumine pour le coup d’envoi. L’Argentine, vêtue de son maillot bleu emblématique du Mondial 86, se déploie en un 4-4-2 en losange, orchestré par le talentueux Juan Román Riquelme, qui occupe le rôle d’enganche. Sa mission est de fournir des passes précises à la redoutable paire d’attaquants, Crespo et Tévez. Riquelme symbolise le renouveau de l’équipe argentine sous la direction de José Pékerman, qui prône un style de jeu basé sur la possession, inspiré du toque, tout en intégrant des accélérations percutantes. En 2006, El Profe loue son meneur de jeu : « Le football moderne produit de plus en plus de sprinters. Malheureusement, on voit de moins en moins de footballeurs comme Riquelme, des gens qui comprennent tout ce qui se passe autour d’eux plus vite que les autres. » Cependant, dans un Olympiastadion bondé de 70 000 spectateurs, l’Argentine se montre avant tout combative, neutralisant les tentatives offensives d’une Mannschaft dirigée par Jürgen Klinsmann. Michael Ballack, le stratège du Bayern, peine à échapper à la pression argentine, et avec un Miroslav Klose aux abonnés absents, l’équipe allemande semble désorientée, multipliant les fautes. L’Argentine, en dominant la possession avec 65 % à la mi-temps, n’a cependant pas encore tiré au but. À la 49e minute, sur un corner parfaitement exécuté par Riquelme, Roberto Ayala (1,77 m) propulse le ballon d’une tête puissante, le faisant passer entre Jens Lehmann et Philipp Lahm : 1-0 !
Pour la première fois depuis le début du tournoi, la Mannschaft est menée… Les Allemands réagissent en investissant le camp argentin avec détermination, mais se heurtent à une défense bien organisée. Les tentatives de ballons aériens « à l’allemande » sur les corners de Bastian Schweinsteiger illustrent leur impuissance. Malgré l’entrée dynamique de David Odonkor à la 62e minute et une demi-volée de Ballack contrée, l’Argentine lance quelques contre-attaques pour maintenir la pression. À la 70e minute, le gardien argentin Roberto Abbondanzieri, blessé à la hanche, est remplacé par Leonardo Franco. Dans la minute suivante, Schweinsteiger tente un coup franc audacieux de 35 mètres, mais le ballon s’envole dans le ciel des désillusions. L’Allemagne semble perdre espoir. À la 71e minute, José Pékerman décide de remplacer Juan Riquelme par Esteban Cambiasso, un choix défensif censé renforcer l’équipe argentine pour les 18 dernières minutes à tenir…
Un tournant décisif : Riquelme reste sur le terrain !
Avant de faire sortir Riquelme, Pékerman consulte rapidement ses deux adjoints, Hugo Tocalli et Néstor Lorenzo. Ce dernier soutient le remplacement pour préserver Riquelme, qui a joué l’intégralité des quatre matchs précédents, sauf les 10 dernières minutes contre les Oranje (0-0). Lorenzo propose d’introduire Pablo Aimar, un autre playmaker, à la place de Riquelme. Cependant, Tocalli s’oppose fermement, arguant que retirer Riquelme perturberait l’équilibre de l’équipe. Riquelme a encore de l’énergie à revendre, et cela enverrait un message de faiblesse à Klinsmann et à son adjoint Joachim Löw. Convaincu, Pékerman décide de garder Riquelme sur le terrain. Cambiasso ne sera pas le remplaçant tant attendu par Vikash Dhorasoo.
De plus, Pékerman fait entrer Lionel Messi à la 80e minute à la place de Crespo, semant le trouble dans la défense allemande. À la 89e, la Pulga obtient un coup franc après une faute de Mertesacker à 20 mètres du but de Jens Lehmann. Une distance parfaite pour Riquelme, expert en coups francs. Flash-back : le 26 avril précédent, lors des demi-finales de la Ligue des champions, Villarreal-Arsenal (1-0 pour les Gunners à l’aller), Riquelme avait vu son penalty repoussé par le gardien allemand, entraînant l’élimination du Sous-Marin jaune (0-0). Cette fois, Riquelme frappe le ballon Adidas Teamgeist, qui s’élève au-dessus du mur avant de retomber en feuille morte dans la lucarne droite de Lehmann : 2-0 ! Les bras grands ouverts, Riquelme célèbre sa revanche sous les acclamations des hinchas et des cris de joie du banc argentin : l’Argentine est en demi-finale ! Dans les dernières secondes, Ballack centre pour Tim Borowski, qui dévie de la tête pour Klose, marquant d’un puissant coup de casque à 6 mètres : 2-1 ! C’est le 5e but de « Miro », le dernier de la compétition pour la Mannschaft, éliminée de son propre Mondial…
Conclusion :
Lors de la conférence de presse d’après-match, un Jürgen Klinsmann visiblement affecté annonce sa démission, qu’il qualifie d’irrévocable. Angela Merkel félicite « une Nationalmannschaft enthousiasmante qui a redonné fierté à notre peuple, tout en célébrant la richesse d’une belle nation multiculturelle ». Uli Hoeness, manager général du Bayern, qui avait qualifié l’équipe nationale de « désastreuse » avant le Mondial, reste silencieux, tandis que Franz Beckenbauer, en tant qu’organisateur impartial, salue sportivement la qualification de l’Argentine. Le 3 juillet, la fédération allemande annonce la nomination de Joachim Löw comme nouveau sélectionneur, « pour poursuivre les orientations prometteuses de Jürgen Klinsmann ». Le 4 juillet, lors de la demi-finale Argentine-Italie à Dortmund, avec 20 000 supporters argentins présents, l’Argentine l’emporte (1-1, 4-3 aux tirs au but). Hernán Crespo (11e) égalise après un but précoce de Luca Toni (6e), tandis que Daniele De Rossi et Fabio Grosso échouent aux tirs au but face à Leo Franco, héros de la rencontre.
De retour à Berlin, le 9 juillet, pour la finale contre la France, qui a battu le Portugal en demi-finale (1-0), l’Argentine surprend en titularisant Messi ! Le duel tant attendu entre les numéros 10, Zidane et Riquelme, tient toutes ses promesses. ZZ est à l’origine du but de Malouda, lancé en profondeur (1-0, 70e), et Riquelme, après un une-deux, sert Messi pour l’égalisation (1-1, 85e). En prolongation, une tête de Zidane sur un centre de Willy Sagnol offre aux Bleus leur deuxième étoile (103e, 2-1 final). Célébrant la victoire, Raymond Domenech évoque au micro de TF1 « la conjonction astrale favorable, alignée au Verseau », plutôt que la fin glorieuse de Zidane, qui disputait son dernier match. Sir Alex Ferguson, quant à lui, en profite pour rencontrer Riquelme, qu’il convoite depuis longtemps : il rejoindra Manchester United cet été ! Enfin, Lionel Scaloni, défenseur argentin remplaçant lors de ce Mondial, conclut : « Ce soir, je ne suis pas déçu, car je sais qu’avec Leo Messi, l’Argentine sera à nouveau championne du monde. »
La France talonne toujours l’Argentine au classement FIFA